Phase IV : Vers les preuves de concept cliniques

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Phase IV : Vers les preuves de concept cliniques

Valider nos approches pharmacologiques et de médecine régénératrice (2016 – 2020)

Le 4ème plan stratégique d’I-Stem a coïncidé avec la migration de l’Institut dans des locaux flambant neufs, offerts par le Genopole dans le cadre du CRCT (Centre de Recherche Clinique et Translationnelle). Nous y occupons en propre 1600 mètres carrés, dont la moitié répartis en 4 zones expérimentales de 200 mètres carrés chacune, respectivement consacrées à la culture des cellules humaines (laboratoires confinés L2), à la biologie « sèche » (biochimie et biologie moléculaire), aux technologies robotiques de production et d’analyse, et aux secteurs support (microscopie, cryopréservation, serveurs, etc…). L’autre moitié du laboratoire est occupée par les secteurs bureaux (80 personnes), le magasin et les espaces de vie et de circulation. L’accès est, de plus, ouvert à une grande salle de conférence de 200 mètres carrés et à plusieurs pièces de réunion.

En ce qui concerne les activités propres des équipes de recherche biologique d’I-Stem dans le développement des produits de thérapie cellulaire, on peut les regrouper en trois catégories : l’achèvement des programmes en cours, l’innovation en vue d’une amélioration des programmes en cours, l’innovation au service de programmes futurs.

— Tout d’abord, bien sûr, nous allons au bout de nos programmes en cours, c’est-à-dire dans la période couverte par ce 4ème plan stratégique, jusqu’au transfert de technologie complet à la structure industrielle chargée de la production des MTI, et à la mise en œuvre des essais cliniques. En l’absence d’établissements pharmaceutiques possédant de prime abord les compétences requises à la production de cellules dérivées de lignées pluripotentes, nous sommes d’abord passés par une phase exploratoire durant laquelle nous avons testé plusieurs prestataires potentiels. Seul Atlantic BioGMP (ABG), l’établissement de l’EFS à Nantes, a su répondre pleinement aux cahiers des charges de STREAM et PACE. La collaboration étroite avec les équipes de l’EFS-ABG nous a d’ores et déjà permis de déposer une demande d’essai clinique pour le traitement de rétinites pigmentaires, qui a abouti à une autorisation délivrée par l’ANSM le 23 janvier 2019. L’essai clinique lui-même, sponsorisé par CECS/I-Stem et encadré par les équipes du Département transversal de management clinique et réglementaire de l’Institut des Biothérapies, sera réalisé par nos collaborateurs de l’Institut de la Vision et de l’Hôpital des XV-XX (Paris). Le programme de production en conditions GMP est aujourd’hui en cours à l’EFS-ABG pour le programme PACE (épiderme), en vue d’un essai clinique en collaboration avec des équipes de l’AP/HP en 2020.

Les produits de thérapie cellulaire développés peuvent aussi être modifiés pour mieux répondre aux besoins. Nous avons lancé ce programme d’amélioration sur l’épiderme. Parce qu’il n’est composé que de kératinocytes, le feuillet PACE ne reproduit en effet qu’imparfaitement ce tissu, a fortiori l’entièreté de la couverture cutanée. Nos travaux ont abouti ces dernières années à l’identification de protocoles de différenciation pour des populations cellulaires complémentaires, les mélanocytes qui pigmentent la peau et la protègent contre l’effet génotoxique des UV, et les fibroblastes qui sont l’élément primordial du derme et assurent, notamment, l’interface avec les vaisseaux sanguins. Le programme de thérapie cellulaire « peau » à I-Stem va donc se poursuivre en vue de créer un produit plus complet, dont l’épiderme sera pigmenté et associé à une sous-couche dermique. Cela nous permettra d’engager un programme clinique « PACE 2 » dont les indications pourront être élargies à un spectre de pathologies au-delà des ulcères cutanés drépanocytaires.

Nous cherchons à développer de nouveaux produits cellulaires, dérivés cette fois non plus de cellules ES mais de cellules iPS. L’accent a été mis depuis des années à I-Stem sur les possibilités complémentaires qu’offriraient des produits de thérapie cellulaire dérivés de cellules iPS, parce que la confection de ces lignées peut être réalisée à partir de donneurs sélectionnés. Or la thérapie cellulaire, comme toute greffe d’élément biologique, se heurte à la difficulté créée par le système immunitaire dont l’activité vise à rejeter toute intrusion de matériel biologique possédant une identité immunitaire reconnue comme différente de celle du receveur. Une solution imaginée par des scientifiques britanniques il y a une quinzaine d’années consiste à aller chercher, dans la population générale, des donneurs particuliers qui possèdent ce que l’on appelle un « haplotype triple-homozygote », c’est-à-dire qu’ils n’ont qu’un seul type d’antigène HLA-A (= les 2 A sont identiques), un seul type d’antigène HLA-B et un seul type d’antigène HLA-DR. Ces donneurs devraient ainsi être compatibles pour des hétérozygotes possédant les 3 mêmes marqueurs et 3 autres dont l’identité précise n’a plus de conséquence. Nous avons déterminé et publié (en 2013) que le donneur triple-homozygote possédant l’haplotype le plus courant dans la population caucasienne (A1, B8, DR3 : il est donc A1A1, B8B8, DR3DR3) pouvait à lui seul servir 14,5% de la population (hétérozygotes A1Ax, B8By, DR3DRz) en France et dans tous pays de population caucasienne. Nous collaborons étroitement dans la production de lignées iPS de ce type avec l’équipe d’AnneLise Bennaceur-Griscelli en France, la Global Alliance for iPS Therapies (GAiT) au niveau mondial.

Il existe par ailleurs plusieurs autres voies de contournement du système immunitaire, que l’on regroupe sous les termes de « cellules fantômes » (ou furtives). Les équipes d’I-Stem explorent aujourd’hui ces pistes en collaboration étroite avec Thierry Heidmann et ses équipes qui ont identifié les bases moléculaires de tels contournements observés dans des conditions physiologiques (e.g. la grossesse) et nous ont proposé de les mettre à profit pour la médecine régénératrice.

— En ce qui concerne nos programmes de modélisation pathologique et de pharmacologie, nous poursuivons ceux entrepris lors du 3ème plan stratégique parmi lesquels, la myotonie de Steinert, la myopathie de Duchenne (avec un programme spécifique nouveau sur l’impact neurologique des dystrophinopathies), l’amyotrophie spinale infantile, plusieurs myopathies des ceintures (programme lancé à la fin du 3ème plan), le syndrome de Wolfram, l’épidermolyse bulleuse simplex, la neurofibromatose de type 1 et la maladie de Huntington. Nous renvoyons les lecteurs qui souhaitent une présentation détaillée de ces projets de recherche aux pages des équipes qui les présentent spécifiquement.

En parallèle, nous ouvrons aujourd’hui au travers du programme MyoPharm des collaborations sur plusieurs maladies neuro-musculaires ultra-rares (dont la prévalence ne dépasse pas quelques centaines en France) autour de programmes portés par d’autres instituts spécialisés (GIPTIS, NeuroMyogene, Généthon, Institut de Myologie, etc…). Il nous paraît en effet techniquement possible aujourd’hui d’étudier de façon systématique les mécanismes pathologiques qui accompagnent les mutations à l’origine de n’importe laquelle des maladies neuro-musculaires et d’utiliser ces données pour identifier des composés pharmacologiques capables de s’y opposer. Les fondements scientifiques et technologiques d’un tel programme peuvent se résumer, schématiquement, en quelques grands termes :

1. Des lignées de cellules iPS (induites à la pluripotence) peuvent être dérivées à partir de cellules de n’importe quel patient porteur d’une pathologie neuro-musculaire.
2. Des protocoles de culture cellulaire permettent d’obtenir les motoneurones et les myotubes qui sont les modèles in vitro les plus pertinents pour étudier les pathologies neuro-musculaires.
3. Une technique (CRISPR/Cas) permet de modifier le génome cellulaire de façon à créer ou à corriger une mutation ponctuelle, ce qui rend possible l’établissement des lignées contrôles corrigées pour la mutation causale de la pathologie dont on a besoin pour identifier par comparaison les anomalies moléculaires et cellulaires associées à la mutation.
4. Le séquençage à haut débit (dans ses applications à l’analyse de l’expression génique), permet de comparer le fonctionnement moléculaire des cellules mutées et des contrôles et d’identifier ainsi des anomalies moléculaires.
5. Les plateformes analytiques à haut contenu permettent l’étude multi-paramétrique systématisée des phénotypes cellulaires et fonctionnels découlant de ces anomalies moléculaires.
6. Les outils de criblage à haut débit sont applicables aux populations cellulaires mutées, ouvrant la voie à l’identification de candidats-médicaments auxquels on peut ensuite faire suivre rapidement – du fait de leur repositionnement – l’ensemble du chemin vers les essais cliniques.